Alan HOLLINGHURST – La ligne de beauté

Titre original : The line of beauty (2004)

Pour résumer : (4ème de couv’) Nick Guest, fils d’un petit antiquaire de province et brillant boursier d’Oxford, s’installe à Londres pour mener à bien sa thèse de littérature. Il loue une chambre dans l’hôtel particulier des parents de son ami Toby Fedden, et entre dans l’intimité de la famille : Gerald, le père, un ambitieux député tory, Rachel, la mère, sœur d’un baron fortuné, et Catherine, leur fille maniaco-dépressive. Nick devient le spectateur fasciné d’une société où les héritiers des grandes familles, les ladies désœuvrées et les conservateurs règnent en maîtres.

Comment il est arrivé entre mes mains: lu en partenariat avec BOB et le Livre de Poche. Choisi pour la quatrième de couv’ et la mention du Man Booker Prize.

Impressions de lecture: J’ai été partagée entre l’académisme de la narration (structure linéaire, descriptions lentes et style parfois ampoulé) et mon intérêt pour le roman d’initiation. Le personnage principal, Nick, est un témoin privilégié de l’hypocrisie, des rites, de l’élite londonienne. Cet aspect sociologique est intéressant. De même l’évocation de son homosexualité, ses joies et ses peurs, viennent pondérer l’académisme par des parenthèses modernes, vivantes.

Mais pas suffisamment : l’ambiance mondaine, le cadre, les dialogues (bien écrits et jouant sur les non-dits) m’ont malheureusement parus très datés. Le roman ne fait aucun effort pour aller vers le lecteur ; cette exigence oblige le lecteur à s’élever, à se creuser la tête, et j’aime cette ambition de principe, mais jusqu’à un certain point. J’attendais beaucoup du fonds, mais la forme m’a fait décrocher au bout d’un tiers du pavé. On sent un fort héritage littéraire anglais, Henry James en particulier, et j’ai trouvé cette lenteur inadaptée au monde contemporain. Dommage.

Merci néanmoins à BOB et au Livre de Poche pour ce partenariat!

Ce roman a obtenu le Man Booker Prize en 2004.

Virginie DESPENTES – Apocalypse Bébé

Grasset (Août 2010) – 343 pp.

Pour résumer: Une adolescente de 15 ans, Valentine, est introuvable. Une détective privée, Lucie, commence l’enquête; elle ne s’en sort pas, et fait appel à une légende du milieu: la Hyène. Salles de concert, joints, lignes de coke, route, les méthodes de la Hyène rompent la routine de Lucie. D’informations glanées en rencontres décalées,  histoires familiales, entourage large, de Paris à Barcelone, Valentine dont on parle tant est toujours introuvable.

Comment il est parvenu entre mes mains: c’est une auteur que j’avais envie de découvrir depuis un certain temps, histoire de me former mon propre opinion sur elle. La littérature francophone contemporaine et moi on n’est pas souvent très copines, et j’avais envie de tenter l’aventure, pour faire honneur au nom de mon blog et à mes goûts éclectiques!

Impressions de lecture : je suis franchement perplexe avec ce livre. 

Je l’ai lu assez vite, je me suis parfois marrée. Fonction divertissante et loisirs de la lecture: contrat rempli. Mais est-ce que je m’en souviendrais l’année prochaine? Dans dix ans? Je ne crois pas. L’écriture très « air du temps » (expressions, marques) va vieillir très vite passé l’effet médiatique, je crains que ça ne parle plus aux lecteurs dans quelques années. La fin est marquante, d’accord, mais comme un cheveu sur la soupe.

Je serai même encore plus méchante: si ce roman avait été signé d’un(e) parfait(e) inconnu(e), aurait-il été publié? primé? Je l’ai trouvé « lisable » mais très loin d’être renversant, piquant, rock, machin chose. Certains passages, à force de vouloir sonner ultra contemporain, tout ce qu’on veut, c’en était ridicule. Je ne suis pas prête de retenter du Despentes, ou peut-être en version essai, parce que sa fiction mouais bof bof. 

Je le recommande: aux bobos parisiens et de navarre qui veulent être branchouilles avec cette couverture pop sous le bras. Sinon si vous avez beaucoup de transport en commun à faire, ça vous fera rire avant et après votre journée de boulot.

Ce roman a obtenu le prix Renaudot 2010 et avait figuré dans la dernière sélection du Goncourt 2010.

Richard FLANAGAN – La fureur et l’ennui

Belfond (2008) – 344 pp. / Existe en poche chez 10-18 (Avril 2010)

Titre original : The Unknown Terrorist (2006)

Pour résumer: La Poupée vit dans la fureur de Sydney : les clubs de strip tease où elle est pole dancer, la techno entêtante, l’argent facile, les marques de luxe, les taxis qui s’arrêtent là où elle passe. Mais ce n’est pas la vie à laquelle elle aspire, elle économise billet par billet pour s’acheter un appartement, reprendre des études à la fac, avoir une existence respectable digne du Lucky Country (pays chanceux, surnom de l’Australie). Un soir de carnaval, elle rencontre Tariq, passe la nuit avec lui, et sa vie bascule. Les écrans de la ville, du pays, du monde, sont braqués sur elle, la terroriste inconnue en cavale.

Comment il est parvenu entre mes mains: emprunté à la bibliothèque suite à une recommandation d’une ancienne collègue férue de culture australienne et une amie l’avait également lu. J’avais envie de découvrir cet auteur depuis un certain temps.

Impressions de lecture: je l’ai lu assez rapidement, ce qui est plutôt bon signe, mais l’ai trouvé inégal. Le titre français ne rend pas du tout justice au sujet du roman, cette descente aux enfers du personnage principal, attention aux attentes de lecture faussées (pourquoi certains traducteurs se croient obligés de changer le titre!).

Le suspense. La cavale de la Poupée dans Sydney est haletante, on la suit, on sent sa panique, sa course folle et le temps qui est compté. La construction en crescendo est réussie.

♦ Ce fonds de terrorisme post 2001, d’islamophobie, de paranoïa généralisée et ces réflexions sur la corruption des médias, la désinformation et récupération politique, c’est parfois étouffant et ça m’a gênée. Qu’en pense réellement l’auteur? Théorie du complot, démagogie, fiction?

♦ Roman inégal du point de vue du style: et vas-y que je te balance des noms de marque, et des passages de pathos ultra mauvais… mais cet auteur a retenu mon attention néanmoins, deux de ses romans me tentent et me font saliver d’avance, je retenterai.  

Je le recommande: aux amateurs de suspense et de romans noirs, le suspense est maintenu. Egalement pour les curieux d’Australie qui veulent du changement, ici pas de plages ni de surfeurs, cette île géante n’est pas épargnée des peurs occidentales. A intercaler entre deux lectures plus légères car roman parfois cru et plombant.

Tom ROBBINS – Une bien étrange attraction

Gallmeister (Juin 2010) – 392 pp.

Titre original : Another roadside attraction (1971)

Pour résumer : Années 60, USA. Amanda, jeune femme plaisante à regarder et facilement sujette à des transes de voyance, épouse le magicien et ex-musicien John Paul Ziller. Décidés à vivre comme bon ils leur semble, ils retapent un resto de route et le transforment en zoo et en stand de hot-dogs artisanaux, dans l’espoir qu’ils deviennent les meilleures du pays, voire du monde. Un baboin, un échappé de prison, un ancien joueur de football/dealer, un indien, leurs rencontres sont aussi barjos qu’eux.

Comment il est parvenu entre mes mains: lu dans le cadre de l’opération Masse Critique organisée par Babelio, et les Editions Gallmeister (si vous aimez la littérature américaine et que vous ne connaissez pas encore Gallmeister, courrez explorer leur catalogue!). Choisi car je connaissais déjà le bonhomme, découvert cette année avec la réedition de Même les cow-girls ont du vague à l’âme, qui est l’un de mes coups de coeur 2010.

Impressions de lecture : j’ai aimé retrouver le style débordant de métaphores brillantes et détonnantes. Sa capacité à peindre son personnage féminin avec admiration, sensualité et n’ayons pas peur des mots : virtuosité. Que ce soit Sissy dans Même les cow-girls ont du vague à l’âme, et ici Amanda, elles sont excentriques, attachantes, extravagantes, des héroïnes barjos, fantasques.  Une des grandes réussites de la recette Tom Robbins.

(ça ne l’emporte pas sur le positif), mais…  :

♦ Certaines longueurs peuvent faire perdre pied, et nuisent au brio du style. Attention à la lassitude provoquée par des digressions qui n’apportent rien au récit.

Je le recommande: aux lecteurs convaincus de Tom Robbins. Je conseille plutôt Même les cow-girls ont du vague à l’âme pour le découvrir. Sans modération pour les amateurs de styles déjantés, d’univers déglingos sixties.

Pour donner un avant-goût: une petite vidéo de l’éditeur, représentative de son univers : ici.

Merci à Babelio et Gallmeister pour ce partenariat!

Mattia SIGNORINI – La Symphonie du temps qui passe

Presses de la Cité (Août 2010) – 182 pp.

Titre original : La Sinfonia del tempo breve (2009)

Pour résumer: Green Talbot grandit dans un endroit paisible, immuable : un petit village d’Angleterre nommé Tranquillity. Sa curiosité le poussera à aller aux frontières du village, pourtant mal famées, et lui donner l’envie d’aller voir ailleurs ce qu’il s’y passe. La France, l’Amérique, l’océan, les oiseaux, les femmes, son parcours sera rempli de rencontres et d’aventures.

Comment il est arrivé entre mes mains: lu dans le cadre de l’opération Masse Critique de Babelio. Choisi pour sa magnifique couverture et l’attente d’un récit initiatique, genre que j’apprécie.

Impressions: j’ai eu un mal fou à finir ce petit bouquin… je ne suis pas arrivée à accrocher. Si l’idée de départ, un récit initiatique à travers les pays, les années et les rencontres, était intéressante, avait du potentiel, le résultat est un récit squelettique et décevant.

♦ Sur la forme : le style est simpliste et maladroit, particulièrement la première partie qui m’a fait penser à des contes pour enfants vieillots. Quel public était visé?! Les chapitres sont courts, les descriptions pas assez développées, le vocabulaire pauvre : bref squelettique, pas assez de chair pour que je m’y plonge.

♦ Sur le contenu : c’est bien gentillet… sauf une scène au beau milieu du bouquin qui fait complètement tache au vu du reste. Le côté « essai de réflexion métaphysique sur la vie » ne m’a pas du tout convaincue.  

Je le recommande: si vous recherchez  un éblouissement stylistique, passez votre chemin. Mais je pense que ça peut plaire si vous recherchez une lecture facile.

Merci à Babelio et aux organisateurs de Masse Critique, ainsi qu’aux Presses de la Cité

Sur le marketing du livre et le book trailer

On voit fleurir depuis quelques années des « book trailer » qu’on pourrait traduire par « bande annonce d’un livre ». Des publicités vidéos inspirées de la bande annonce promouvant un film, histoire d’avoir un outil marketing de masse. Cette pratique ne s’est (heureusement?) pas généralisée à tous les titres qui sortent, seulement ceux qui ont déjà un potentiel commercial.

♦ Si au départ c’était très américain ou plus largement anglophone, on commence à en voir des francophones. Je voulais comparer deux exemples tirés de mes deux dernières lectures, publiées au sein de la même maison d’édition américaine Knopf (vidéos en anglais).

♦ Mode marketing pour le dernier roman d’Anne RICE : Angel Time (L’heure de l’ange).

♦ Mode sobriété pour le premier roman de Tania JAMES : Atlas of Unkowns (L’atlas des inconnus).

Visible sur le site de l’auteur : ici.

♦ Il y a donc de tout, dans les book trailers, comme il y a de tout dans une librairie, pour tous les publics.

→ Mais ma curiosité reste intacte : le but de cette démarche est de donner envie de lire le bouquin en question, et de l’acheter. Est-ce que ça marche vraiment? Est-ce que l’attention du lecteur/client potentiel est vraiment attirée par un book trailer? Cette espèce de quatrième de couv’ en vidéo ne dessert-elle pas au contraire? Concrètement : avez-vous déjà craqué pour un livre avec un book-trailer? Personnellement non…

Tania JAMES – L’atlas des inconnus

Stock, coll. La Cosmopolite (Août 2010) – 494 pp.

Titre original : Atlas of Unknowns (2009)

Pour résumer : Années 1990, Inde. Deux soeurs grandissent avec leur père et leur grand-mère. Linno, l’aînée, présente des qualités artistiques : ses dessins forcent l’admiration; la cadette, Anju, débute brillamment sa scolarité. Après l’accident qui a rendu leur famille bancale et emporté leur mère, une deuxième perte va bouleverser leurs vies. Linno se brûle la main lors d’un feu d’artifice, on doit la lui couper. Elle arrête l’école, dessine à temps plein. Anju entend parler d’un programme d’échange pour étudier 1 an aux USA, rêve d’une vie meilleure, ailleurs. Elle n’a aucun talent particulier, et pour partir, va trahir sa soeur.

Comment il est arrivé entre mes mains : lu dans le cadre d’un partenariat spécial Festival America de Vincennes organisé avec BOB et les Editions Stock. Après deux partenariats plus que râtés et mal choisis de ma part, celui-ci m’a tapé dans l’oeil et mon instinct s’est réveillé : c’est une belle découverte!

Impressions: première lecture de cette rentrée littéraire, ça commence fort.

J’ai globalement aimé. Les thèmes m’ont intéressée : le décalage culturel entre l’Occident et l’Orient, la barrière de la langue, la rencontre de classes sociales, la quête d’indépendance (ses joies, illusions & échecs), le rêve américain, la filiation féminine (mère, soeur), l’amitié féminine. J’étais en Inde, puis à New York, je sentais l’odeur des plats et voyais l’intensité des couleurs des saris. Belle puissance d’évocation.

L’écriture est accessible, fluide et montre un effort littéraire. Beaucoup de pudeur et d’espièglerie.

♦ La fin m’a un tantinent déçue, trop convenue. Et à force de jouer sur les non-dits, à force de rester dans le flou sur certaines questions, le lecteur peut perdre pied. Le titre, par exemple, n’est pas évoqué ni expliqué, dommage.

Je le recommande: si vous recherchez une lecture dans laquelle on fond comme dans un bain. Une lecture prenante, avec laquelle on prend plaisir à retrouver, le soir avant de s’endormir, le matin avant d’attaquer la journée et un petit moment volé dans le bus. 

Un autre avis, celui d’Emily.

Un grand merci à BOB et aux Editions Stock, La Cosmopolite ne vole pas sa réputation…

Anne RICE – Angel Time

Arrow Books (poche : Juillet 2010, première édition : Octobre 2009) – 288 pp.

Traduction française : L’heure de l’ange – Michel Lafon (Février 2010)

Pour résumer : Un tueur à gages commence sa nouvelle mission sans grand enthousiasme : il doit tuer un riche banquier, il prend son temps et visite son église favorite, se penche sur son passé. La culpabilité de tuer, ses pêchés, etc.

Est-ce que ça vaut vraiment la peine de continuer?

Un point nécessaire sur l’auteur: il s’agit dun 27ème roman d’Anne Rice, auteur que j’ai découvert au collège il y a une dizaine années et avec laquelle j’ai passé de beaux moments de lecture. J’ai collectionné ses livres, des éditions rares, j’ai commencé à lire en anglais avec ses livres, enfin bref c’est une grande histoire. Pour moi c’était l’auteur de l’excès, de la démesure; du fantastique vampirique aux castrats italiens du 18ème à la réecriture érotique d’un conte de fée, elle a entamé un virage stylistique et un renforcement thématique autour du christianisme. Très marquée par le thème de l’immortalité, qui lui a valu son heure de gloire avec ses Chroniques des vampires, elle débute avec Angel Time (VF: L’heure de l’ange) une nouvelle série.

Comment il est parvenu entre mes mains: je l’ai boudé à sa sortie il y a un an, ça ne me disait rien, j’avais peur de la grosse bouse.

Impressions de lecture : ♦ un lecteur nouveau peut éventuellement apprécier. Mais on ne me la fait pas à moi. Le protagoniste est l’ombre, la version squelettique, anorexique délavée, de Lestat (charismatique héros des Chroniques des Vampires). Blond, yeux gris, voulant être prêtre dans son enfance, attiré par le spectacle (la musique, le théâtre, etc.) et la sainteté des églises… puis ils deviennent des tueurs, et finalement vient la rédemption, la lumière après les ténèbres. Si elle pensait que ses lecteurs les plus fidèles et ayant une mémoire qui fonctionne ne fassent pas le parallèle, c’est raté.

♦ Le style? Pour être honnête, je ne l’ai jamais vraiment trouvée très douée pour peindre l’univers contemporain, ça sonne généralement faux, sauf quelques passages des Chroniques. Elle m’a fait vibrer sur du 19ème, du 18ème, même plus loin dans le temps, mais alors là… c’est sec, cette espèce de Mafia ridicule, les flingues et tout, AU SECOURS! J’aimais son écriture généreuse, baroque, charnue et sensuelle, du genre « crème fraîche 30% de matière grasse » onctueuse et riche. Là c’est de l’allégée liquide qui m’a parue trop fade pour aller au delà de la moitié du bouquin.

Des clichés et des phrases d’une pauvreté indigne d’elle. Je n’ai senti aucun effort d’imagination, c’est du réchauffé de précédents livres, le goût en moins. Aucune passion ne s’est dégagé de cet écrit. Comme si elle faisait « son job », qu’elle appliquait une recette commerciale sans ajouter sa patte. Ce roman été marketé comme « thriller chrétien ». Je ne sais pas ce que cela signifie au juste, mais je dirais que c’est du vite fait vite imprimé vite emballé.

→ Je suis d’autant plus critique et dure que je ne connais son oeuvre et sa carrière sur le bout des doigts.

Je le recommande: si vous voulez découvrir Anne Rice, je vous en prie, faites-vous (et faites-moi!) plaisir : tout sauf ça. Entretien avec un vampire, quelques autres titres des Chroniques valent vraiment le coup aussi comme Le vampire Armand, La voix des anges, ou encore la Saga des sorcières (trilogie). Si vous l’avez déjà lue et apprécié, c’est à vos risques et périls.

Sur l’Espresso Book Machine et l’avenir des librairies

C’est en farfouillant des articles sur l’avenir des librairies (question qui m’intéresse de près puisque j’ai travaillé et j’espère travailler à nouveau dans une librairie…) que je suis tombée sur ça : la Espresso Book Machine, dite EBM.   

La vidéo est en anglais, mais on peut comprendre le fonctionnement de la bête sans maîtriser la langue de Shakespeare 😉 

♣ Je suis ultra partagée par cette invention et les possibilités que ça engendrerait si elle se diffusait plus largement. A ce jour il y en a moins d’une centaine en fonctionnement, aux Etats-Unis et au Royaume-Uni.  Elle coûte la bagatelle de 70 000 Euros, ça calme.

♣ Même si je vois plein d’avantages techniques comme effectivement une rentabilité optimum entre le coût de production et le prix de vente (on peut exploser la marge pratiquée je pense, d’après le chiffre de revient proposé dans la vidéo), la place économisée, un catalogue dématérialisé, plus de stock à gérer, et aussi plus de personnel à payer… C’est très pratique, marketing, développement durable (car qui dit impression à la demande dit plus de retours, plus de destruction de livres au pilon) et tout ce qu’on veut.

♦ Mais je frissonne en même temps car ça serait à terme la mort des librairies. J’essaye d’imaginer la chose : au lieu de plusieurs étages pour certaines, ou plus modestement une pièce pour d’autres, des rayons entiers de livres, des êtres humains pour conseiller, on aurait un box avec une machine. Pourquoi ne pas faire un système de paiement par carte bleue, comme pour l’essence ou les films, pendant qu’on y est? Un distributeur de livres, en libre service, 24h/24, 7j/7.

♦ Est-ce que ça correspond vraiment au désir de consommation de la population? Est-ce comme ça qu’on veut accéder au savoir, à la culture ou au divertissement? La rapidité, la rentabilité, le « je claque des doigts et ça tombe »?

♣ Une cohabitation me semble plus réaliste et concevable : je n’arrive pas à imaginer la disparition totale et brutale des librairies. Les disquaires disparaissent, d’accord, et certaines librairies ferment ou ont du mal à équilibrer leur trésorerie, mais les chiffres sont là : les livres se vendent encore. Comme il existe des librairies spécialisées en éditions anciennes, pour un public de bibliophiles, de collectionneurs, et des librairies de livres neufs, pour un très large public, peut-être que cette invention se cumulera à ce qui existe déjà sans détruire.

→ Votre avis m’intéresse! (Libraires, lecteurs, clients, …)

Georges FLIPO – La commissaire n’aime point les vers

La Table Ronde (Février 2010) – 300 pp.

Pour résumer: Un hiver, à Paris. Un SDF est retrouvé mort. La commissaire de la 3ème DPG, Viviane Lancier, plutôt vieille école et terre à terre, est chargée de l’affaire. On lui a collé un adjoint plutôt atypique, débutant, et surtout… licencié en Lettres Modernes. Son tempérament littéraire, son zèle, ne correspondent pas à la discipline des procédures, il cumule les bourdes. Dans la besace du SDF, fervent admirateur d’Hugo, se trouvait une mystérieuse enveloppe au contenu des plus étonnants : un sonnet aux tournures baudelairiennes.  L’enquête s’enlise, et les morts se multiplient autour du sonnet: qui le touche trépasse ou presque…

Pourquoi cette lecture? : j’ai soif de polar en ce moment, et les billets qui avaient fleuri sur la blogosphère à sa sortie me laissaient envisager un bon moment de lecture. L’accueil critique « professionnel » avait également été bon. Je l’avais vu décrit comme un polar littéraire, une commissaire à la tête d’une équipe d’hommes, une enquête tournant autour d’un poème de Baudelaire, enfin bref il ne m’en fallait pas plus.

Impressions: je l’ai lu vite, l’écriture est fluide, les pages se tournent, les chapitres se succèdent sans longueurs ni temps mort. Premier bon point donc le rythme.

J’emploie parfois le mot « sympathique » avec des arrières-pensées négatives, mais là non, c’est un roman vraiment sympathique. J’ai eu un peu peur à la première page d’être dans une ambiance « série policière sur la 1 en prime-time » avec les régimes de la commissaire mais finalement non, cette dérision tombe à pic pour contrebalancer les meurtres. J’ai aimé les évocations de Baudelaire, on sent la documentation, mais on ne tombe pas dans l’admiration béate du poète, et ça chapeau.

♦ Bémol : un discours anti-médias un peu manichéen et lourd parfois. 

Je le recommande: volontiers! Aux littéraires qui voudraient découvrir le polar, ça serait un début en douceur, les références à la littérature plus classique (Hugo, Baudelaire) font une balise idéale. Une lecture détente avec un supplément de culture, mélange réussi.

Les petits truc en + : pour découvrir l’auteur, voici son blog et son site.